mercredi 19 février 2014

Nul n’est plus envahissant que les absents….

Ce que je peux te dire d'elles (Anne Icart)




Si j’ai choisi ce roman c’est plus par hasard qu’autre chose. En effet, en passionnée de couture,  j’ai été attirée par sa couverture aux couleurs chatoyantes de petites bobines de fil à coudre….. puis j’ai vu qu’il s’agissait d’un roman sur les vies entremêlées de plusieurs femmes (ce que j’adore) et qu’il se déroulait entre autre au sein d’une entreprise de haute couture….. alors comment résister ?? Et bien je n’ai pas pu !!

De prime abord j’ai été surprise par le style narratif plus que prédominant étant donné que les dialogues sont pour ainsi dire absent….. j’ai donc redouté une certaine lourdeur descriptive difficile à avaler….. mais pas du tout !! Ce petit livre (282 pages chez Pocket )se dévore !!
L’auteur nous présente d’abord sa narratrice, Blanche, au petit matin alors que son téléphone sonne…. Et elle n’aime pas ça, Blanche, pour elle c’est forcément le signe de mauvaises nouvelles…... et voilà, nous comprenons déjà que la vie n’a pas dû être tendre pour notre héroïne.  Mais voilà, surprise….. cette fois il s’agit d’une bonne nouvelle puisqu’elle apprend que sa fille, Violette, vient de donner naissance à un petit garçon…. Le premier d’une longue lignée de femmes. Le cadre est posé et nous comprenons que c’est des vies de ces femmes dont nous allons d’une façon ou d’une autre nous retrouver les témoins….. ce que nous comprenons  aussi c'est que la souffrance de Blanche, ou du moins une de ses souffrances, est liée à une rupture entre sa fille et elle puisqu’elle nous révèle qu’elle ignorait totalement la grossesse de Violette. C’est un certain Raphaël , que nous pouvons  supposer être le papa du nouveau-né, qui a appris la merveilleuse nouvelle à Blanche et il lui propose de venir à Paris voir son premier petit fils. Après hésitation, ne sachant pas comment sa fille va prendre sa venue, elle décide malgré tout de se lancer et monte dans un train Toulouse/Paris, le ventre noué par le stress. C’est au cours de ce trajet que Blanche va faire de nous les témoins des destins des femmes qui ont marqué sa vie. En effet, elle se remémore alors tout ce qu’elle voudrait dire à sa fille et qu’elle a consigné avec soin dans une série de petits carnets de moleskine…. Un retour en arrière pour nous livrer tout ce qu’elle peut nous dire d’elles.  En proie au doute tout au long de son voyage,  Blanche se replonge donc dans son passé en se demandant si sa fille acceptera de la voir et de lire les précieux carnets qu’elle souhaite tant lui remettre afin de lui dire qui elle est, elle, Blanche livrant ainsi à Violette les clefs de sa propre identité.

Avec Blanche pour guide nous plongeons donc  dans la vie de quatre générations de femmes s’étalant de 1950 à nos jours….. et nous ne sommes pas au bout de nos surprises.
L’auteur utilise une écriture empreinte de sensibilité en nous immergeant dans les sentiments les plus intimes des personnages pour faire de nous les témoins de ces histoires de vie qui, au premier abord pourraient être vues comme s’inscrivant dans un cocon familial bien établi alors qu’en réalité nous allons être immergés dans des sentiments violents et dévastateurs basés au contraire sur l’instabilité des racines même de cette famille.
Et c'est Blanche qui se fait le porte-parole des souvenirs de sa mère pour nous livrer ce très beau récit..... en effet, nous comprenons que ces témoignages de vies qui nous sont livrés sont issus de la retranscription par Blanche d'enregistrements audio réalisés par sa mère mais Blanche a voulu y ajouter une part d'elle-même, aussi c'est à travers ses yeux grandissants au fil du récit que nous allons nous faire témoins de ces vies de femmes. ce procédé nous immerge réellement au plus proche des sentiments de la narratrice, ainsi nous allons d'abord vivre le récit au travers des yeux et du cœur d'une Blanche petite fille puis adolescente et enfin adulte.
Ce procédé contribue subtilement à nous faire ressentir l'impact de cet environnement si peu conventionnel sur la construction psychologique de cette femme qui nous guide dans le récit.

Une question s'impose ici à notre esprit: pourquoi ces carnets? Pourquoi la mère de Blanche a-t'elle eu besoin de se livrer et pourquoi Blanche elle même a-t'elle a son tour voulu transmettre la vie et les sentiments de sa mère en les mêlant aux siens? Deux réponses nous effleurent alors: le besoin de se raconter, de laisser une trace, de faire un bilan de vie au terme de celle-ci mais peut-être aussi le besoin de se justifier, de demander pardon à ceux qui restent..... mais de quelle absolution s'agirait-il alors?

C’est ainsi que nous allons commencer notre voyage dans une minuscule maison de Montesquieu, dans les Pyrénées,  où la doyenne des femmes de  cette œuvre, mémé Anna, va recueillir ses trois petites filles et les élever dans un monde exclusivement féminin. Anna sera pour Angèle, Justine et Babé une figure maternelle, la seule qu’elles connaîtront mais bien qu’elle ait fait de son mieux, nul ne remplace une maman et Anna partira bien trop tôt plongeant ainsi les trois filles dans la nécessité de grandir avant l’heure.

Laissez-moi vous présenter un peu de ces trois filles que nous allons voir grandir et évoluer tout au long du roman de leur vie.

D’abord il y a Angèle qui a été abandonnée par sa mère, Augustine, et que son père a préféré confier à mémé Anna, sa grand-mère maternelle…. Double abandon pour une enfant qui verra son père en pointillé et passera sa vie à espérer le retour de sa mère tant aimée et haie à la fois. Ensuite il y a Justine qui est en fait la cousine d’Angèle puisqu’elle est la fille de Barthélémy, l’un des trois fils d’Anna. Justine est déposée chez mamie Anna aves sa petite sœur Babé à la mort de leur mère Clémentine. Leur père, désespéré d’avoir perdu sa femme qui était l’amour de sa vie sombre dans la dépression, devenue l’ombre de lui-même il se sent incapable d’élever ses deux filles et préfère les confier à sa propre mère. Pour sa part, Babé, la petite sœur de Justine est encore un bébé lorsqu’elle arrive chez mémé Anna. Et c’est dans le foyer créé pour elle par Anna que ses trois fillettes trop tôt privées de mère  vont devenir des sœurs.

Voilà, le décor est posé : trois fillettes marquées par l’abandon volontaire ou non de leur mère, par celui de leur père, figures de lâcheté plus que de héros, marquées par l’absence, le vide et son omniprésence qui persiste malgré toute la bonne volonté d’Anna.

Et ce sont ces trois fillettes que nous allons voir grandir et devenir des femmes….. des femmes qui vont façonner leur histoire mais, nous le comprenons déjà, également celle de Blanche.


Bon, pour ceux et celles qui veulent garder entier le mystère de ce petit bijou de roman il est temps de nous séparer car désormais je vais vous révéler le cœur de cette œuvre afin de vous faire part d’une analyse plus complexe de la personnalité de ses femmes attachantes et complexes…… Pour ceux et celles qui veulent continuer le voyage avec moi, c’est par ici :



Séparée peu de temps pendant leurs études respectives, toutes trois vont être réunies par la vie, par les épreuves, par les pertes….. d’abord celle de mamie Anna puis celle de Barthélémy. C’est ensemble qu’elles vont cimenter leur improbable cocon familial…. Mais cela suffira-t ’il a rééquilibrer ces vies qui se sont construites sur le manque et l’abandon ?

Angèle devient une femme magnifique, brillante journaliste à la Dépêche du Midi mais d’une fragilité à fleur de peau elle est à la merci du moindre événement de vie qui pourrait la faire basculer dans la dépression.  Angèle va rencontrer Charles, journaliste qui va la lancer dans le métier et devenir le grand et même l’unique amour de sa vie. Nous apprenons alors qu’Angèle n’est autre que la mère de Blanche mais que cette dernière ne connaîtra jamais son père mort tragiquement 3 mois après avoir appris qu’il allait devenir père et programmé son mariage avec Angèle, l’amour de sa vie. L’histoire se répète….. encore un absent, encore une enfant qui grandira sans père, sans structure familiale traditionnelle mais cette fois pourtant avec un mère.

Justine qui a voulu suivre le chemin de sa mère en exploitant ce qu’elle savait être son plus grand talent, est devenu une couturière aux doigts de fée. Opiniâtre, elle est partie de rien pour construire un véritable petit empire en construisant sa propre maison de haute couture. Indépendant c’est naturellement qu’elle va s’intéresser au mouvement féministe naissant, dictée par sa volonté de rester pleinement maîtresse de sa vie afin d’éviter toute souffrance liée à l’abandon d’un être aimée, ce qu’elle redoute le plus au monde.

Babé, douce, fidèle, toujours prête à encaisser les coups durs, à consoler, sera malgré sa position de cadette, le pilier de ce petit univers féminin.  Babé qui pendant quelques année, après avoir épousé Henri son grand amour, va quitter le cocon créé avec ses trois sœurs à Toulouse….. mais elle reviendra Babé quand son désir inassouvi d’enfant aura eu raison de son couple malgré l’amour, quand, lassé de se sentir mis de côté par l’amour de son épouse pour ses sœurs et surtout pour Blanche, sa nièce sur laquelle elle a reporté tout son amour maternel, Henri lui posera un ultimatum : elles ou lui ? Et bien ce sera elles….. Scellant par là même un destin presque exclusivement féminin pour elles quatre, destin  forgé par les accidents de la vie autant que par leurs choix, destin marqué par l’absence d’hommes, des hommes qui les ont abandonnées en partant ou en mourant trop tôt. Des hommes qu’elles ont perdu mais auxquels elle sont resté fidèles, refusant de les remplacer comme l’ont fait Angèle et Babé ou des hommes de passage ne trouvant jamais de réelle place dans leur vie comme il en défile sans fin dans la vie d’une Justine qui multiplie le conquêtes furtives afin de ne pas être confrontée à la perte ou l’abandon.

C’est donc au sein de  cette famille si peu conventionnelle que va grandir Blanche….. mais une plante peut-elle pousser droit si ces racines ne sont pas bien ancrés dans la terre et si elle n’a pas de tuteur solide pour la soutenir ?

Sans père c’est au milieu de ces trois femmes, de ses trois mères (« maman, maman, maman, mamans ») que Blanche va devenir elle-même une femme…..

Mais Blanche va avoir bien du mal à trouver son équilibre. En effet malgré les bonnes volontés le manque est omniprésent dans la vie et dans le cœur de chacune de ses mamans et ce vide, Blanche va naturellement en hériter mais plus difficile encore elle n’aura pas le soutien d’un foyer traditionnel sur lequel s’appuyer pour essayer de redresser la barre. En effet, non seulement l’absence de son père ne pourra jamais être comblée mais pire, à sa naissance, sa mère, pour qui Charles était tout, va décompenser sur le plan psychologique, ne supportant pas la présence de ce petit être qui ressemble tant à son grand amour. C’est ainsi qu’Angèle va sombrer et devenir bipolaire, oscillant entre phases maniaques pendant lesquelles sa fille est tout pour elle au point de l’étouffer et phases dépressives où elle la rejette totalement et avec  violence. Comment une enfant pourrait se construire dans de telles conditions ? Même si ses tantes et surtout Babé vont lui servir de pilier, celui-ci est trop faible pour préserver cette fillette pour qui sa maman est double : maman d’en haut qui l’aime et maman d’en bas qui la rejette….. et là Blanche se réfugie dans ce qu’elle appelle elle-même son terrier. Blanche grandit donc dans l’angoisse, l’incertitude, l’amertume, la colère refoulée, contre sa mère mais surtout contre son père….. c’est plus facile, après tous les absents ont toujours tort.  C’est dans ce climat plein d’amour et pourtant si instable que Blanche va grandir mais comment  devenir une adulte équilibrée lorsque les piliers de l’enfance sont si instables….. L’absence d’un père, le déséquilibre psychologique de sa mère, autant de carences qui ne peuvent être comblées et ne peuvent que laisser des souffrances. Comme bien des enfants dans ce cas, Blanche va se montrer brillante, et, à l’image de sa mère et de ses tante, va réussir dans sa vie professionnelle mais le succès et la lumière des projecteurs ne pourront jamais combler l’abîme dans lequel un cœur est plongé depuis l’enfance et la souffrance ne fait que grandir faisant ainsi d’un enfant triste une adulte dont la douleur est constante.

C’est ainsi que Blanche va souffrir toute sa vie dans son cœur et s’est sûrement cette douleur qui va la conduire à son tour à reproduire le schéma puisqu’elle va décider de faire un bébé toute seule….. mais par choix !! Pourquoi ce choix ? Par peur de la solitude, car oui, Blanche en a peur….. peur d’être seule, abandonnée alors un enfant c’est moins risqué que d’ouvrir son cœur à un homme car un enfant ça ne part pas, après tout elle n’est pas partie elle, elle n’a pas abandonné sa mère, ses mère. Par désir de conformité également lorsque le compagnon de sa mère lui fait entendre que le temps est venu pour elle de songer à la maternité. Et peut-être par une sorte de vengeance, pour monter à sa mère qu’elle peut faire mieux qu’elle en élevant seule un enfant. Et pour se le prouver à elle-même.  C’est ainsi que va naître Violette. Mais Blanche parviendra-t ’elle à tisser des liens maternels sains et équilibrés ? A ne pas reproduire le schéma qui semble les poursuivre de sa malédiction ? Car c’est bien là le thème dominant de ce roman : comment se tissent les liens maternels lorsqu’ils prennent source dans un climat non conventionnel duquel les hommes sont absents et les femmes marquées par un déséquilibre émotionnel ?

Ce que nous savons depuis le début c’est que Violette va partir, Violette va l’abandonner…. Le plus cruel des abandons pour Blanche. Car Violette va inévitablement lui en vouloir, lui en vouloir de ne pas avoir cherché à créer pour elle ce qui lui a si cruellement manqué à elle, Blanche, lui en vouloir d’avoir fait un choix entièrement égoïste en devenant maman non pour donner la vie mais pour s’approprier une vie.

Face aux reproches de sa fille Blanche finira d’ailleurs par prendre conscience de cette motivation qui a dicté son choix de faire un bébé toute seule et l’exprimera très bien : « Je voulais quelqu’un pour moi toute seule. Quelqu’un que je m’attacherais. Qui ne m’abandonnerait pas. » Et c’est aussi à ce moment-là qu’elle va réaliser qu’elle a échoué car comme elle le dit si bien « cet homme qui est le père de ma fille, par son absence, m’empêche d’arriver jusqu’à elle »…. C’est ici, à cet instant, en se rebellant, que Violette a montré à sa mère qu’il s’est produit exactement ce qui était inévitable et que cette dernière n’a pourtant jamais voulu ni voir ni envisager.

Nous avons bien compris depuis le début du roman que Blanche était hantée par sa vie mais aussi par ses choix….. et nous comprenons là que c’est surtout par ce choix précisément. Ce choix de ne pas chercher à offrir à sa fille un foyer traditionnel qui pourrait lui servir de tuteur afin qu’elle puisse grandir de façon la plus équilibrée possible, pour rattraper le fait qu’il est déjà difficile de s’épanouir sainement lorsque sa maman est en souffrance psychologique.
Et c’est justement sa propre fille qui va lui offrir le mot qui les définie toutes si bien : « bancale ». Car oui c’est bien ça, Angèle, Justine, Babé, Blanche elle-même et maintenant Violette, elles se sont toutes construites sur des sables mouvants et ont toutes grandit sans tuteur solide pour les redresser, elles ont grandi certes….. mais bancales et malheureusement il arrive un moment cet état devient permanent mais la seule chose à faire c’est de construire un cadre solide pour les générations futures, pour que celles-ci puissent se redresser et sortir de cet abîme de souffrance. Blanche a fait les mauvais choix, privant sa fille de ce cadre avant même sa naissance mais Violette, elle, y est peut-être parvenue…..

Nous comprenons sans peine que si Angèle a choisi de se raconter pour demander à sa fille de lui accorder son pardon après sa mort, Blanche, pour sa part, ne souhaite pas attendre qu'il soit trop tard ce qui explique qu'elle ai rajouté son empreinte dans le récit de sa mère afin d'obtenir l'absolution de Violette de son vivant et de pouvoir se rapprocher d'elle.

C’est donc en proie à une angoisse grandissante qu’elle parcourt les kilomètres entre Toulouse et Paris, en se demandant si ces carnets de moleskines suffiront à effacer la rancœur de sa fille….. Certainement pas mais ce n’est pas uniquement sur eux que Blanche fonde ses espoirs.  Car l’espoir elle l’a toujours gardé au fond du cœur (espoir que sa mère reste en haut, espoir que sa fille répare tout le reste, espoir de combler le vide omniprésent de sa vie et de celle de ses trois mères……). Et aujourd’hui c’est en Gabriel qu’elle place tous ses espoirs. Parce que oui, pour elle c’est certain, ce petit bonhomme, premier garçon de leur lignée de femme, ne peux que briser ce cercle vicieux de souffrance,  de solitude et d’abandon. Ce petit ange qui porte si bien son prénom et qui est né au sein d’un véritable cocon conventionnel, qui a toutes les bases pour grandir bien droit, ne peux que ressouder les liens distendus entre sa fille et elle….. non ?

Et pour ce qui est de la suite..... et bien Anne Icart nous laisse libre de nous l'imaginer, renforçant encore une fois notre implication personnelle dans son oeuvre en nous livrant les clefs afin que nous tissions nous-même les fils du reste de la vie des personnages.

Comme je vous l’ai dit si mon choix s’est porté sur ce roman c’est parce qu’il m’a fait de l’œil et pourtant, comme par une judicieuse coïncidence il vient très justement s’inscrire dans la polémique actuelle sur  le maintien de la famille traditionnelle et la théorie du Genre. En effet, l’auteur a fait de nous les témoins des vies de femmes  ayant s’étant construite, ayant grandi et évolué au sein d’une famille non conventionnelle. A travers ce récit vif et chaleureux, Anne Icart nous montre que malgré la réussite apparente, l’émancipation et la tonalité colorée de leur vie (à l’image des collections de Justine) ces femmes n’arriveront pas à dépasser la permanence du manque, de l’absence, qui les a chacune à leur niveau plongées dans un abîme de souffrance dont elles ne pourront sortir. C’est à travers une grande tendresse et justesse des sentiments que l’auteur nous montre à travers son œuvre toute la complexité de la construction d’une personnalité et plus principalement des liens maternels.


Un magnifique roman que je vous invite à découvrir….. et à dévorer d’une traite !!

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